Tout commence par une voix. Une voix impénétrable, une voix rauque, une voix comme de celles que l’on entend peu. C’est peut-être la raison pour laquelle Nicolas Ghesquière, directeur artistique de la maison Louis Vuitton, l’a choisie pour accompagner le défilé de la collection printemps-été 2024, qui a eu lieu en octobre 2023 aux Champs-Élysées.
Zaho de Sagazan est difficile à définir, tant elle est un OVNI sur la nouvelle scène de la chanson française. Un OVNI qui rafle tout sur son passage : à l’affiche des festivals les plus prestigieux et programmée au Zénith de Paris en mars 2024. Un an pile après la sortie de son premier album, La Symphonie des Éclairs. C’est à se demander qui a bien pu passer à côté du phénomène au cours de l’année qui vient de s’écouler.
Zaho de Sagazan, une ado et un piano
Originaire de Saint-Nazaire, Zaho de Sagazan grandit dans une maison où le bruit est omniprésent. Plus précisément : les cris sont omniprésents, ceux de ses quatre sœurs et d’elle-même. Nées de parents artistes, elles vivent dans une liberté rare. Toutes les explorations leur sont permises, du piano à la danse, en passant par le chant et la sculpture (Olivier de Sagazan, père de la fratrie, est lui-même sculpteur et a travaillé sur les clips de Mylène Farmer et FKA Twigs, entre autres). Les après-midis à la maison sont rythmées par les comédies musicales de l’époque, de Mozart, l’opéra rock à Roméo et Juliette. Mais c’est à peine si on entend la musique, couverte par les voix des filles Sagazan.
Enfant extravertie et passionnée de danse, Zaho de Sagazan mue à l’adolescence, et se replie sur le piano familial, qui devient, petit à petit, son plus fidèle ami. Émotive, elle trouve en lui le confort qui lui manque chez autrui, et, inspirée par le compositeur et musicien britannique Tom Odell, commence à écrire ses premiers morceaux. Seule dans sa chambre, elle imagine des histoires d’amour qu’elle ne vit pas encore et couche son mal être adolescent sur le papier.
La maison française donnait rendez-vous à une poignée d'invités entre les murs du 103 avenue des Champs-Élysées, actuellement en rénovation. Voici tout ce qu'il fallait retenir de ce défilé parisien.
Quelque part entre Kraftwerk et Barbara
Enfant de sa génération, Zaho de Sagazan commence à partager sa musique sur Instagram, via des reprises et des compositions originales. Ce n’est qu’une question de temps avant que les rencontres décisives s’enchaînent pour arriver à la sortie de son tout premier morceau, “La déraison”, en mars 2022. Ce qui ressemble au premier abord à une balade au piano et au grain étrange se transforme, à mesure que les secondes passent, en un morceau évolutif, dans lequel on entend un son qui s’apparente au thérémine, réputé pour être le plus ancien instrument de musique électronique au monde (Lev Thérémine, son inventeur, le présente à Lénine en 1920).
Surprenant : les premières références de la jeune femme ne sont ni Barbara, ni Juliette Armanet, malgré une plume qui trace l’héritage de la chanson française. En réalité, Zaho de Sagazan rêve de collaborer avec Kraftwerk, et tire l’ADN de sa musique des nuits berlinoises, préférablement autour des années 80. Son premier album est à l’image de ce mélange peu probable. Conçu avec le concours des musiciens Pierre Cheguillaume et Alexis Delong, La Symphonie des Éclairs, est édité par Warner Chappell, dont le catalogue comprend Aya Nakamura, Angèle ou Stromae. La maison de disque, Disparate, est la sienne – comme un moyen de garder la main sur la direction artistique et conserver sa liberté.
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